Ils sont là, de plus en plus nombreux. Ils viennent du soleil et connaissent le désert ou la forêt. Certains se sont battus pour la France, d’autres l’ont attaquée et rejetée. Leurs parents étaient français et n’ont plus voulu l’être. Eux ne l’étaient pas, mais ont souhaité le devenir. Ceux qui ne les fréquentent jamais veulent qu’on les accueille, mais ceux qui les côtoient souhaiteraient les voir plus loin. La république leur offre les droits de l’homme, mais tous ne veulent pas des droits des femmes. Certains sont venus pour travailler, mais d’autres recherchent les allocations. Ils sont arrivés sans rien, mais beaucoup s’indignent de ne pas avoir assez. Ils ne posent pas de problèmes, mais quelques-uns posent des bombes. La religion de beaucoup d’entre eux n’est pas la nôtre, mais elle est la deuxième de France. Il faut les aimer, même quand ils ne nous aiment pas.
Ce sont les immigrés installés dans notre pays. Ils sont censés s’intégrer, mais leur nombre, et la disparité de leurs origines, de leurs cultures et de leurs religions, les poussent à se constituer en communautés autonomes au sein de notre nation. Des communautés qui ne se reconnaissent pas dans toutes les valeurs de notre civilisation, qui continuent de regarder au-delà de nos frontières et représentent un défi pour notre société et ses équilibres.
L’immigration n’est-elle pas l’un des facteurs d’affaiblissement de l’unité et de l’identité nationale ? Si la cohésion de la société et les valeurs de la république sont aujourd’hui remises en cause, qui peut dire que l’immigration n’y est pour rien ? Quant aux difficultés de cohabitation que connaissent beaucoup de nos compatriotes, seraient-elles aussi grandes si l’immigration était moins nombreuse et moins exotique ?
Pourtant, les maîtres du politiquement correct semblent ignorer toutes ces questions. Ou, plutôt, ils y répondent en nous expliquant que les problèmes sont d’ordre social, liés à un chômage excessif, à un urbanisme déracinant et à une éducation insuffisante. Si les « jeunes » des banlieues brûlent des voitures, c’est parce qu’ils n’ont pas de travail, pas de perspectives et qu’ils sont victimes de scandaleuses discriminations de la part des Français. Il suffit dès lors de réduire cette fracture sociale et tout va s’arranger. La situation va aller s’améliorant, le processus d’intégration, malgré les difficultés, va finir par tout résoudre.
Ils n’en démordent pas, l’immigration est un phénomène à la fois inéluctable et profitable. Car, passé la période d’adaptation, toutes ces populations vont se fondre dans notre peuple, comme l’ont fait autrefois les Polonais, les Italiens ou les Espagnols. Ne vous inquiétez pas, ne vous crispez pas, soyez ouverts, tolérants et accueillants, disent-ils aux Français. Contrairement à ce que certains veulent vous faire croire, ce phénomène est bénéfique pour notre pays. Les populations immigrées compensent les naissances qui manquent à notre peuple pour assurer son avenir. Ce sont elles qui vont payer nos retraites, qui remplacent les enfants que nous n’avons pas, qui effectuent les travaux que nous ne voulons pas accomplir. N’est-il pas extraordinaire de voir ainsi notre société s’enrichir de coutumes et de modes de vie venus des quatre coins du monde ?
Peu importe qu’il y ait chez nous un chômage massif, peu importe que le coût annuel de cette immigration représente sans doute le montant de l’impôt sur le revenu, peu importe que la coexistence des cultures crée tensions et conflits, il faut y insister : tout va bien. Et peu importe que, dans le court terme, ce processus soit surtout marqué par les ghettos urbains, la surdélinquance immigrée, la clandestinité, le chômage, le communautarisme, la violence et la drogue. Peu importe que beaucoup de « jeunes » mettent les cités à feu et à sang et crient leur haine de la France et de ses autorités. Car, nous répète-t-on, les populations étrangères que nous accueillons chez nous s’intègrent, elles vont s’intégrer, tout va rentrer dans l’ordre.
Encore faut-il évidemment que les Français coopèrent, qu’ils fassent l’effort de payer plus d’impôts pour financer les banlieues et aider les populations immigrées. Encore faut-il qu’ils acceptent que celles-ci bénéficient d’avantages et de droits supérieurs aux leurs selon le principe de la discrimination positive qui existe déjà dans les faits et que certains, tel M. Sarkozy, veulent maintenant institutionnaliser. Encore faut-il qu’ils abandonnent ce penchant xénophobe qui serait le leur, qu’ils cessent de se livrer à ces odieuses discriminations et qu’ils pratiquent la tolérance et le partage.
Si cependant nos compatriotes ne se soumettent pas spontanément à cette attitude d’accueil, s’ils se laissent aller à des comportements d’exclusion, il est, nous dit-on, légitime et nécessaire de les sanctionner très durement. Mais, pour éviter d’en arriver là, il faut recourir à la pédagogie, expliquer sans relâche combien il est mal de ne pas aimer l’autre, combien nous devons éradiquer en nous-mêmes et chez nos congénères toute attitude de refus ou de rejet. Aussi y a‑t-il lieu de mobiliser tous les moyens de la société, école, médias, intellectuels, justice, social, pour obtenir enfin des Français un comportement correct.
Pour peu que nos compatriotes y mettent du leur, les populations immigrées vont donc s’intégrer. Elles vont adhérer aux valeurs fondatrices de la république et tout se normalisera. D’ailleurs, comment pourraient-elles ne pas se fondre avec enthousiasme dans notre nation ? La France n’est-elle pas, depuis deux cents ans, la patrie des droits de l’homme ? Et dans ce creuset républicain, toutes les diversités, toutes les identités vont se dissoudre harmonieusement. Suffisamment en tout cas pour créer une communauté unie et solidaire. Qu’on se rassure, nous assène-t-on comme une rengaine, l’intégration, ça marche !
Rien n’est plus faux : ce processus a au contraire lamentablement échoué comme chacun peut le constater. Les émeutes de novembre 2005 qui ont embrasé les cités partout à travers la France sont d’ailleurs venues en apporter la démonstration spectaculaire et tragique. Pendant trois semaines, les « jeunes » des banlieues, presque tous beurs ou blacks, ont mis à feu et à sang leurs quartiers, brûlant, saccageant, attaquant tout ce qui pouvait représenter à leurs yeux la société française. Voitures, écoles, gymnases, entreprises, bus, églises, tout y est passé dans une frénésie de violence et de haine barbare qui ne respectait rien ni personne, pas même les personnes âgées ou handicapées.
Chacun a pu s’apercevoir alors que ces « jeunes » étaient tout sauf intégrés et que la prétendue politique de la Ville débouchait donc sur un échec total. Plus globalement, c’est la politique d’immigration massive et incontrôlée, menée depuis des décennies par tous les gouvernements successifs, qui s’est trouvée brutalement mise en cause. Quant au discours lénifiant sur la possibilité d’intégrer des populations aussi nombreuses et aussi différentes, il a, d’un coup, perdu tout fondement. La classe politique s’est trouvée violemment désavouée par la réalité. Son idéologie politiquement correcte s’est fracassée sur le mur des cités.
Parmi tous les facteurs qui expliquent ce fiasco, l’islam est de loin le plus déterminant. L’intégration ne peut pas réussir avec l’islam, pas plus qu’un mixer ne peut fonctionner avec du sable. Dès lors qu’une fraction majeure de la population immigrée est musulmane, tout le discours sur l’intégration républicaine s’effondre. L’islam, en effet, n’est pas plus soluble dans la république qu’il ne se révèle compatible avec notre civilisation européenne et chrétienne.
En Europe, par exemple, l’homme est considéré comme un être libre et responsable, comme une personnalité à part entière, douée de libre arbitre. L’islam en revanche nie cette liberté et ne reconnaît de droits qu’à Allah. Car, comme son nom le signifie en arabe, l’islam est soumission. Et ce qui vaut pour la personne humaine en général est encore plus vrai pour la femme en particulier. Même lorsqu’elle ne disposait pas des mêmes droits politiques que l’homme, la femme a toujours été considérée dans notre civilisation comme une personnalité à part entière, le mariage, conçu comme l’union exclusive d’un homme et d’une femme, en étant le signe le plus patent. Rien de tel dans le monde islamique qui, en autorisant la répudiation, la polygamie et en accordant à l’homme le droit de battre son épouse, quand ce n’est pas le droit sur elle de vie ou de mort, rejette la femme dans une situation de soumission, voire de servitude.
Comment, dans ces conditions, peut-on espérer une réelle intégration des musulmans ? Le mensonge ou la schizophrénie sont là poussés à l’extrême. On veut, d’un côté, assurer la promotion de la femme, réaliser une parité absolue et lutter contre tous les comportements machistes. Et, de l’autre, on prétend qu’il n’y a aucun problème pour intégrer, au sein de notre société, des millions de musulmans qui rejettent formellement cette perspective.
Autre obstacle majeur, l’islam n’établit pas de séparation entre le spirituel et le temporel. Or, cette distinction est inhérente à la conception européenne du politique. Que ce soit dans la Grèce antique ou dans la civilisation chrétienne, avec le « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », les nations européennes ont, de tout temps, clairement distingué le sacré du profane. Une réalité qui se trouve encore plus affirmée dans le monde d’aujourd’hui avec le principe de laïcité. A contrario, l’islam constitue un bloc religieux, juridique et social dont rien n’est exclu. Cité de dieu et cité terrestre s’y confondent. Il n’y a donc pas de différence entre la loi divine et la loi civile, l’une et l’autre procédant de la charia. Une loi qui n’est pas seulement une prescription religieuse, mais qui concerne tous les aspects de la vie en société, depuis la morale jusqu’à l’action politique, en passant par la justice et la vie sociale.
Les conflits avec notre principe essentiel de laïcité sont donc inévitables. Et ceux qui croient que la loi sur le port du tchador à l’école a définitivement réglé le problème font preuve d’une grande naïveté. Les difficultés resurgissent ailleurs, à l’hôpital, dans les piscines, au sein des administrations ou des entreprises et, plus tard, réapparaitront dans les établissements scolaires. Et, là, nous sommes placés devant un paradoxe total. On nous explique en effet que le système républicain, fondé notamment sur la laïcité, représente une formidable machine à intégrer. Or, c’est précisément ce dispositif, propre à notre république, que contestent et combattent les islamistes.
Il est vrai que, sur cette question, certains de nos compatriotes, sans doute aveuglés par la propagande qui imprègne notre vie quotidienne, se laissent enfermer dans d’insolubles contradictions. Il y a quelques années, par exemple, alors que les problèmes soulevés par le port du tchador à l’école commençaient à se multiplier, je m’étais rendu à Flers, une petite ville de l’Ouest de la France, afin de soutenir des enseignants en grève pour le respect de la laïcité. Les syndicats de l’Éducation nationale étant plutôt orientés à gauche, je fus assez mal reçu. Mais une discussion s’engagea.
« On ne veut pas de votre soutien, on ne partage pas vos positions sur l’immigration.
— Mais ce n’est pas le problème. Aujourd’hui, je suis, comme vous, pour la laïcité à l’école.
— Oui mais nous, nous sommes pour l’intégration républicaine.
— Et ça marche comment cette intégration ?
— D’abord par la laïcité…
— Et s’ils n’en veulent pas ?
— Alors, ils doivent partir. »
L’enseignant qui lâcha cette dernière répartie créa un malaise général. L’un de ses collègues précisa, un peu gêné, qu’il s’agissait de partir de l’école, en d’autres termes d’être exclu de l’établissement. Mais, à l’évidence, la complexité de la situation venait de rattraper ces grévistes de gauche qui découvraient, malgré eux, les incompatibilités de fond entre le monde islamique et le nôtre.
On peut d’ailleurs élargir le propos et s’interroger sur la capacité de l’islam à intégrer le principe même de démocratie. Car, dans la charia, les lois civiles, comme les lois religieuses, sont révélées et imposées par Allah et ne peuvent donc être soumises au vote populaire. Comment ne pas voir, dans ces conditions, qu’il y a là une source de conflit majeur entre l’islam et la république ? D’autant que la doctrine musulmane est très claire à cet égard, comme l’explique M. Hussein el-Kouatli, l’un des directeurs de l’Institution sunnite libanaise qui diffuse des fatwas, c’est-à-dire des avis juridiques. « Le vrai musulman, affirme-t-il, ne peut pas assumer une attitude neutre vis-à-vis de l’État. Ou le chef de l’État est musulman et la loi musulmane, alors il sera en accord avec l’État et le soutiendra. Ou le chef de l’État est un non musulman et la loi non musulmane, alors il rejettera l’État, s’opposera à lui et travaillera à le détruire, paisiblement ou violemment, ouvertement ou secrètement. Cette position est logique parce que l’islam est un système complet et une attitude totalisante. »
En clair, l’islam est en contradiction avec notre modèle politique, avec nos concepts philosophiques, comme avec les valeurs de notre civilisation. Que ce soient les vertus fondamentales du monde européen, telles qu’elles nous viennent de l’antiquité grecque et romaine, qu’il s’agisse des valeurs inhérentes au christianisme qui ont marqué notre monde pendant mille cinq cents ans, que ce soient les principes de la philosophie des Lumières qui ont tant pesé sur notre organisation politique depuis deux siècles, tout cela est incompatible avec l’islam et sa conception théocratique. Liberté et responsabilité individuelle, amour de son prochain, démocratie, droits de l’homme, laïcité, égalité entre les sexes, autant de notions qui séparent le monde islamique du nôtre.
D’ailleurs, malgré les oukases du politiquement correct, certains intellectuels, plus courageux que d’autres, n’ont pas pu s’empêcher de l’affirmer. Claude Imbert, l’éditorialiste du Point, n’a-t-il pas déclaré : « Je suis islamophobe » ? Et d’expliquer : « J’ai le droit, et je ne suis pas le seul dans ce pays, à penser que l’islam — je dis bien l’islam, je ne parle même pas des islamistes — en tant que religion apporte une débilité d’archaïsmes divers. (1) » Michel Houellebecq, lui aussi, a tenu sur l’islam des propos d’une grande lucidité et d’une rare violence. Or, ni l’un ni l’autre ne sont connus pour leur extrémisme. Ce sont deux intellectuels qui cherchent seulement à faire émerger la vérité des abysses où la maintiennent les maîtres penseurs.
On peut certes me répondre et rétorquer à Imbert ou à Houellebecq que l’islam va se laïciser, s’occidentaliser et se moderniser. Pourquoi les musulmans présents en France ne s’adapteraient-ils pas à notre société, ne se plieraient-ils pas à nos coutumes ? Une telle évolution serait en effet parfaitement vraisemblable si nous avions affaire à une petite minorité adepte d’une religion marginale. Mais tel n’est pas le cas.
Les tenants de l’intégration semblent en effet ignorer qu’ils n’ont pas en face d’eux une collection d’individus isolés qu’il suffirait de passer au moule républicain pour leur faire adopter nos mœurs. Ils sont en réalité confrontés à une communauté dont l’effectif est considérable et dont les membres sont liés par leur commune appartenance à une grande religion. Une religion au demeurant sûre d’elle-même et en pleine expansion.
Comment ne le serait-elle pas ? L’islam est en effet un produit médiatique à la mode. On parle de lui dans chaque journal télévisé, on multiplie les émissions à son sujet, on organise des débats, on écrit et on glose sur les musulmans en France et dans le monde. Et l’intelligentsia encourage cette manie, car l’islam lui est indispensable pour nourrir son discours politiquement correct. La pensée unique est en effet structurée par l’idée centrale de la lutte contre les exclusions. Une démarche qui conduit philosophiquement à vouloir intégrer au groupe que l’on constitue ceux qui n’en font pas naturellement partie et, pour ce faire, à dénigrer ce que l’on est et à valoriser celui qui est différent.
Il s’agit, en quelque sorte, d’une idéologie de l’autre. L’autre devient une obsession, il est mieux que soi, il faut lui donner la prééminence, l’idéaliser, le sublimer en s’anéantissant soi-même au passage. Et, pour faire vivre cette idéologie, il faut un « autre » concret, identifiable et proche. Or, dans ce schéma, le musulman constitue l’autre idéal, car il est à la fois tout proche et très différent. Aussi est-il logique que l’intelligentsia ait ainsi la fâcheuse habitude de dénigrer la France et de culpabiliser les Français (nous n’avons pas oublié la « France moisie » de Philippe Sollers pas plus que « l’idéologie française » de Bernard-Henri Lévy), alors qu’elle cherche, en toute occasion, à valoriser l’islam et à faire le panégyrique des musulmans.
Comment, dans ces conditions, la communauté musulmane ne serait-elle pas sûre d’elle ? Face à un monde européen rongé par le matérialisme, délaissant ses propres valeurs, honteux de lui-même, l’islam peut s’affirmer comme une réponse éthique, sociale et politique à la fois forte et durable. En tout cas, l’islam, lui, n’est pas gagné par le doute et n’a rien de décadent : il est fier de ses croyances, il offre des perspectives spirituelles exigeantes et défend des règles morales strictes. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les conversions de Français de souche à la religion islamique commencent à se multiplier.
De plus, les musulmans ne se reconnaissent pas de lien privilégié avec le pays dont ils sont issus et encore moins avec celui qui les accueille. Car leur allégeance principale va à l’islam, c’est-à-dire à la communauté des croyants. Lors de la publication des caricatures de Mahomet par un journal danois, les émeutes qui ont éclaté au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie ont bien montré la force de cette solidarité islamique. Les musulmans de France ne se sentent donc pas isolés face à la mécanique d’intégration républicaine. Ils ont au contraire le sentiment de faire partie d’une immense communauté transnationale aux innombrables ramifications, une communauté qui se trouve de surcroît en pleine expansion.
Après une longue léthargie, l’islam connaît en effet un regain de dynamisme un peu partout dans le monde. Sur le plan démographique d’abord, son aire d’influence est dorénavant la zone géographique de loin la plus féconde. Sur le plan géopolitique, les territoires occupés par les musulmans sont passés, d’après Samuel Huntington, de deux millions et demi de kilomètres carrés en 1920 à quinze millions de kilomètres carrés en 1993. Sur le plan économique enfin, les pays islamiques jouissent globalement d’une richesse croissante, avec le contrôle d’une fraction importante de la production mondiale de pétrole.
Les musulmans présents dans notre pays, qui se comptent maintenant par millions, sont donc partie prenante d’une communauté transnationale particulièrement forte et solidaire qui ne se réfère ni à nos coutumes ni à nos valeurs. D’ailleurs, l’actualité nous en apporte régulièrement la preuve. Comment expliquer autrement que des terroristes islamiques puissent poser des bombes dans un pays dont ils ont la nationalité et tuer sans état d’âme des centaines de civils censés être leurs compatriotes ? C’est pourtant ce qui est advenu en Grande-Bretagne lors des attentats de Londres en juillet 2005, mais aussi en France avec ceux du RER en 1985. Pour ces musulmans, il n’y a d’allégeance qu’à l’islam transnational et nullement à la nation dont ils ont la carte d’identité.
Sans aller jusqu’à des comportements aussi extrêmes, c’est aussi cette réalité de fond qui explique la montée de l’antisémitisme dans notre pays. Un antisémitisme musulman qui résulte de l’importation sur notre sol du conflit israélo-palestinien et qui montre que les musulmans français se sentent infiniment plus proches de leurs frères palestiniens que de leurs compatriotes juifs !
Nous sommes donc loin du schéma idyllique et officiel d’immigrés qui s’assimileraient grâce au modèle républicain pour devenir français comme tout un chacun. La France n’est nullement en train d’intégrer les musulmans à la façon dont elle a absorbé des générations d’Italiens, de Portugais ou de Polonais. En réalité, le système d’intégration ne fonctionne pas et c’est un processus de communautarisation qui se met en place progressivement.
Lorsque les musulmans étaient encore peu nombreux sur notre sol, il n’en allait pas ainsi. Les immigrés venus travailler en France il y a trente ans désiraient réellement s’intégrer à notre communauté nationale. Mais leurs fils, même s’ils sont apparemment plus francisés que leurs pères, ont souvent une tout autre approche. J’en ai eu le sentiment particulièrement aigu un soir de campagne électorale, lorsque, faisant du porte-à-porte dans un quartier pavillonnaire de Vitrolles, un vieil Arabe m’ouvrit son portail et m’invita à entrer chez lui. La maison était de proportions modestes mais confortable, l’homme était retraité d’Eurocopter où il avait occupé pendant vingt ans le poste de gardien.
Avec son accent encore marqué, il m’expliqua combien il aimait la France et combien il lui était reconnaissant de ce qu’elle lui avait apporté. À côté de lui, son fils, un grand gaillard au look moderne, s’agitait sur son siège : manifestement, il n’approuvait pas les propos de son père. Finalement, n’y tenant plus, il prit la parole avec une agressivité contenue : « Moi, je ne suis pas d’accord, dans ce pays on ne nous aime pas, on ne fait rien pour nous. Et d’ailleurs, moi, je suis musulman et la France elle sera à nous. » Sans doute est-ce là le propos d’un jeune quelque peu exalté, mais il reflète hélas un aspect de la présence musulmane en France dont personne ne peut aujourd’hui nier la réalité.
Loin de vouloir s’intégrer, une partie de la communauté islamique se place en effet dans une démarche conquérante. Car, ne l’oublions pas, l’islam est par nature expansionniste et violent. Mahomet était lui-même un chef de guerre autant qu’un chef religieux et c’est par la guerre qu’il a commencé à imposer sa religion. La guerre sainte, le djihad, se trouve d’ailleurs au cœur de la vision musulmane du monde car la doctrine islamique traditionnelle définit clairement, à côté de la « demeure de l’islam » (Dar al-islam), la « demeure de la guerre » (Dar al-harb), qui désigne l’ensemble du monde non musulman auquel il faut faire la guerre, qu’il faut conquérir et convertir.
Voilà pourquoi nous ne sommes pas seulement confrontés à l’incapacité des musulmans de s’intégrer à notre peuple, mais aussi à la volonté de certains d’entre eux d’islamiser notre nation. Car l’islam, qui ne distingue pas le politique du religieux, mène, au nom de la religion, un projet politique offensif visant à mettre en pratique le Coran sur notre sol dans toutes ses conséquences publiques, culturelles et sociales.
Certains musulmans, souvent de nationalité française, agissent délibérément dans ce sens. Et s’ils ne font pas leur le poème cité, il y a quelques années, par M. Erdogan, le premier ministre turc, « les minarets sont nos baïonnettes, les coupoles sont nos casques, les mosquées nos casernes et les croyants nos soldats », on pourrait dire à leur sujet, en reprenant une comparaison moins militaire, que leurs associations sont leurs partis, la charia leur programme, les mosquées leurs permanences et les fidèles leurs militants. Quant à leur action, elle apparaît bien comme politique et utilise d’ailleurs la technique de l’agit-prop chère aux révolutionnaires d’extrême-gauche.
On peut dès lors s’inquiéter des propos lénifiants de nos responsables politiques et médiatiques qui semblent ignorer ces réalités et continuent à donner foi aux idées fausses qui sont les leurs. Comment cependant peuvent-ils ne pas être informés ? Un haut fonctionnaire, exerçant d’importantes responsabilités au ministère de l’Intérieur, me confiait récemment sous le sceau de la confidence : « Nous fonçons dans le mur. Chacun le sait, les émeutes l’ont prouvé, mais personne ne veut tourner le volant ni appuyer sur le frein. »
Peut-être exagère-t-il, peut-être n’est-il pas si tard. Il est vrai que cette démarche conquérante des islamistes n’est pas le fait des musulmans dans leur ensemble, elle concerne seulement de petits groupes en nombre limité. Pourtant, les islamistes, bien que minoritaires, peuvent parfaitement mobiliser demain les « jeunes » des banlieues et, au-delà, les masses musulmanes au service de leur projet.
En tout cas, rappelons-nous cette prévision de Charles de Foucauld que personne ne peut accuser d’avoir manqué d’amitié pour les peuples d’Afrique du Nord : « Des musulmans peuvent-ils être vraiment français ? Exceptionnellement, oui. D’une manière générale, non. […] le musulman regarde l’islam comme sa vraie patrie et les peuples non musulmans comme destinés à être tôt ou tard subjugués par lui musulman ou ses descendants. (2) »
Sans doute faudrait-il maintenant accepter la réalité telle qu’elle est et admettre que l’intégration ne marche pas. Affirmer le contraire, c’est présenter comme juste une idée fausse, c’est tromper les Français et préparer des catastrophes.
Au nom de l’intégration, on désintègre notre pays. Le mixer ne fonctionne pas avec du sable.
1. Claude Imbert, sur LCI, 24 octobre 2004.
2. Lettre de Charles de Foucauld à René Bazin, Bulletin catholique de presse, n° 5, oct. 1917.